La crise du Covid 19 n’aura cessé de faire naître les questionnements juridiques inédits et le droit de la famille n’est pas en reste. En effet, après les modalités d’exercice du droit de visite et d’hébergement durant le confinement, se pose à présent la question de la vaccination des enfants mineurs lorsque les parents sont séparés ou divorcés et qu’ils ne partagent pas la même vision du vaccin.
Le principe de l’exercice conjointe de l’autorité parentale est rappelé par les articles 372 et suivants du Code civil. L’article 372-2 du Code civil a introduit la notion d’acte usuel comme critère déterminant, pour le tiers de bonne foi, de la présomption du consentement des deux parents : « A l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant. »
Ainsi, en cas d’urgence (article L 1111-5 du Code de la Santé publique) ou si l’acte médical est considéré comme usuel par le médecin, ce dernier présumera que le consentement des deux parents est donné et il ne se suffira que de l’accord d’un seul parent pour réaliser cet acte.
La qualification d’acte usuel ou non est donc déterminante. La Cour d’appel d’Aix-en-Provence, dans un arrêt en date du 28 octobre 2011, a défini les actes usuels de la manière suivante : « Les actes de la vie quotidienne, sans gravité, qui n’engagent pas l’avenir de l’enfant, qui ne donnent pas lieu à une appréciation de principe essentielle et ne présentent aucun risque grave apparent pour l’enfant, ou encore, même s’ils revêtent un caractère important, des actes s’inscrivant dans une pratique antérieure non contestée ».
En matière médicale, sont donc considérés comme actes usuels les soins obligatoires, courants et habituels ( ex : blessures superficielles, interventions chirurgicales bénignes et nécessaires, traitement des maladies infantiles ordinaires etc.).
Concernant plus particulièrement la vaccination, les juridictions considèrent qu’elle est un acte usuel si elle est obligatoire. Pour autant, la jurisprudence récente a précisé qu’a contrario, la vaccination non obligatoire n’est pas systématiquement un acte non usuel (Conseil d’État, 4 octobre 2019, n°417714 ). Dans ce cas, le médecin doit apprécier un ensemble de critères :
- Le caractère obligatoire ou non de la vaccination ;
- L’âge du patient ;
- La nature de la vaccination ;
- Les caractéristiques du patient ;
- L’ensemble des circonstances dont le médecin a connaissance.
Il semblerait que le législateur ait décidé de qualifier la vaccination contre le Covid-19 d’acte usuel, bien qu’elle ne soit pas obligatoire. En effet, le pass sanitaire s’appliquant aux 12-17 ans à compter du 30 septembre prochain, la vaccination ne sera pas soumise au consentement préalable des deux parents. En effet, l’article 1er II, G de la loi n°2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire en vigueur au 6 septembre 2021 fait ainsi primer la santé publique sur le principe de coparentalité :
« Lorsque le Premier ministre prend les mesures mentionnées aux 1° et 2° du A présent II, seule l’autorisation de l’un ou l’autre des titulaires de l’autorité parentale est requise pour la réalisation d’un dépistage ou l’injection du vaccin contre la covid 19, sans préjudice de l’appréciation des éventuelles contre-indications médicales. »
Ces 1° et 2° du A présent II reprennent l’exigence du pass sanitaire pour une série d’activité et précise : « Cette réglementation est applicable aux mineurs de plus de douze ans à compter du 30 septembre 2021.. »
La loi coupe donc court aux éventuels désaccords entre parents et aux litiges corrélatifs devant le juge aux affaires familiales, de quoi faciliter la prise de décision mais envenimer la relation entre parents séparés ou divorcés. Toutefois, cette autorisation étant donnée sous réserve de contre-indications médicales pour l’enfant, il sera conseillé au parent souhaitant procéder à cette vaccination de faire préalablement établir un certificat médical par le médecin traitant attestant de l’absence de telles contre-indications.